Séance 1 : 30 août, suite.
La véritable aventure commence
Le reste du voyage est évoqué rapidement. Après avoir passé le gué d’Ent, les personnages ne s’arrêtent pas à Edoras afin de ne pas perdre de temps, et filent droit sur Fort-Le-Cor…
Evoquer la puissance qui se dégage du Gouffre de Helm n’est pas chose aisée et mes pauvres talents d’orateur sont à la peine (d’autant que nous sommes fin août et qu’il fait très chaud, ce qui ramollit assez nettement mon cerveau).
J’aurai pu puiser dans les sources originales pour voir si une description bien tournée aurait aidé à mieux évoquer la découverte de ce lieu mythique. En général, je m’efforce de rester bref dans les descriptions, allant directement aux points les plus marquants (sinon les joueurs peuvent vite trouver ça lassant). Toutefois si on veut respecter l’ambiance du Seigneur des Anneaux, quelques descriptions ne sont pas de trop, et lire un ou deux paragraphes pas trop longs aurait pu être une bonne idée (mais le travail de localisation des paragraphes, lui, est probablement coûteux en temps).
Cela montre une des difficultés de jouer dans les Terres du Milieu : on veut préserver l’ambiance, la magie, évoquer les scènes qui nous ont fait vibrer. C’est possible mais cela demande de la préparation, et il ne faut pas que la préparation induise trop de « railroading » juste parce qu’on a prévu une joli petite description d’ambiance. Ma stratégie est d’essayer de m’en remettre plus qu’avant à l’improvisation, soutenue par un peu d’immersion personnelle dans les textes (ou films / produits dérivés, lorsque l’aspect visuel me plait). Certains Meneurs avec lesquels je joue (sur d’autres jeux) semblent avoir cette capacité à l’évocation spontanée, en peu de mots bien choisis : c’est une des choses que j’apprécie le plus en tant que joueur mais que je peine encore à développer.
A Fort-le-Cor, une audience est rapidement octroyée auprès d’Eogar, après que les joueurs aient évoqué la nature de leur mission. Nous arrivons ainsi au début de la « vraie » aventure, « The wrath of Riders », après une introduction somme toute un peu longue et sans gros enjeux immédiats, mais à mon sens nécessaire pour vraiment poser le cadre.
La rencontre avec Eogar dans le supplément n’est pas présentée comme une séquence de Rencontre, et je décide de suivre cette approche en la jouant en pur « roleplay » : après tout les personnages ne sont que les messagers, donc Eogar ne leur accorde que peu d’importance (au début), et eux n’ont rien d’autre à faire qu’à délivrer la lettre.
Toutefois ils assistent à sa réaction lorsqu’il découvre ce qui lui est demandé. On peut supposer que la demande de signer la paix avec les Dunlendings lui est pénible, au bas mot, mais il garde un calme relatif et prend à la lettre la proposition du Roi : que le messager et sa suite soient à sa disposition, aux fins de l’aider dans cette mission.
Eogar saisit l’occasion. Arguant que ces hommes sont très mobilisés, et conforté par l’appartenance de certains PJ à l’eored de l’Aigle, il demande (ordonne ?) aux aventuriers de conduire les négociations avec les Dunlendings, et de lui en rendre compte. Les aventuriers passent la nuit à Fort-le-Cor.
Il faut d’abord parvenir à localiser des implantations Dunlendings au-delà de la Brèche du Rohan, afin d’établir des premiers contacts et « remonter » vers des centres de pouvoir, inconnus des Rohirrim.
Pour cela Eogar invite les héros à se rendre au Gué de Isen, frontière occidentale du Rohan, un lieu fortement gardé. Il pense que les clans Dunlendings qui sont les plus menaçants se trouvent sur la rive Nord de l’Isen, à quelques jours de la frontière.
Il n’y a pas de gros défi à surmonter jusqu’au Gué de l’Isen, la route est réputée sûre, je ne fais donc (toujours) pas de jet de Voyage. J’espère que mes joueurs ayant investi beaucoup sur cette compétence ne m’en voudront pas…
Toutefois, malgré la (théorique) sureté de la route, après une journée ils voient au loin une fumée qui attire leur attention. Une ferme a été visiblement ravagée il y a quelques jours. Les fermiers ayant pu s’enfuir à temps, il n’y a que des dégâts matériels, ainsi que du bétail volé. La fermière qu’ils rencontrent semble prendre cela avec dépit. Visiblement, depuis quelques années les relations des frontaliers avec les Dunlendings avaient plutôt tendance à s’améliorer après les sombres années du règne de Fengel.
Les raids récents interrompent donc cette bonne dynamique, mais la fermière ne voit pas dans les voisins de l’Ouest que des pillards. « On pouvait même bien commercer, avec les plus pacifiques », révèle-t-elle.
Au Gué de l’Isen, les personnages sont très froidement accueillis par Leofward, jeune capitaine de la garnison stationnée au Gué. Apprenant les intentions des aventuriers, il n’a pas la même réserve qu’Eogar et exprime tout son mépris à l’idée de faire la paix avec ses ennemis.
Toutefois, à la faveur d’arguments convaincants et de bons jets de dé (sans jouer une Rencontre formelle), il s’adoucit un peu sans toutefois changer d’avis sur la question, et accepte de donner des indications plus précises sur deux villages Dunlendings, et fournit un guide qui connait un peu la région.
Au-delà des frontières
On sort alors des terres du Rohan, et la compagnie atteint rapidement un endroit nommé les Tourbières Rouges (the Red Moor) dans lequel l’exploration est hasardeuse et les risques de s’enfoncer (notamment à cheval) importants.
Comme un guide Rohirrim les accompagne, ils arrivent néanmoins sans encombre dans un premier village Dunlending construit sur pilotis au cœur des Tourbières. Là se révèle une désolation totale. En explorant les ruines du village encore fumantes des indices révèlent de nombreux morts, des cadavres déchiquetés (source de points d’Ombre !).
Après découverte d’indices (Fouille, et informations de leur guide), ils arrivent à la conclusion que ce massacre n’est pas (que) le résultat de représailles des Rohirrim, qui se contentent généralement de mettre le feu aux habitations sans s’en prendre aux villageois, mais probablement l’œuvre d’orques ayant profité de la vulnérabilité de la situation.
Ils décident alors de suivre des traces qui amènent plus profondément encore dans les Tourbières, auprès d’un deuxième village. Celui-ci, bien que partiellement déserté, semble avoir été moins touché que le premier, et les aventuriers rencontrent un enfant se cachant entre les pilotis. Il n’y a personne d’autre en vue, mais l’enfant (nommé Mornun) révèle que sa mère est dans une des maisons encore debout, que son père est absent, et que le reste des villageois s’est caché au loin après que leurs maisons ait été incendiées.
La mère pleure la disparition de sa sœur, mais il n’est pas possible d’en tirer grand chose, et lorsque Comlar, le père de Mornun parti chasser revient, ce dernier exprime toute son exaspération aux hommes du Rohan, mais s’apaise un peu en voyant l’attitude conciliante des personnages.
Désemparé, il leur explique que sa jeune fille Mearwhen a disparu dans la nuit. Ils venaient de revenir au village depuis quelques jours, dans l’espoir de le reconstruire après que les Rohirrim soient venu y mettre le feu dans les précédentes semaines. Il pense toutefois que la disparition est le fait de Margotins (ma traduction maison de « Woodkin »), des créatures sournoises qui ont la réputation de capturer les enfants en pleine nuit. Il doit rester ici protéger sa femme et son fils face aux autres dangers des Tourbières, mais lorsque les personnages lui proposent d’aller la chercher, son regard s’illumine.
Notes : J’ai essayé d’entretenir un peu de mystère autour de ces Margotins, mais les joueurs se sont rapidement convaincus qu’il s’agit des orques dont ils suivaient les traces (ils ont fait de bons jets de Chasse, j’ai donc révélé la nature des créatures qu’ils suivaient), et je commets un lapsus révélateur qui dissipe tout mystère. Mon intention était d’en faire des sortes de mauvais esprits de la forêt, et de jouer sur le fait qu’en jouant sur les noms des créatures, on pouvait aussi jouer sur la perception des joueurs et sortir d’une confrontation traditionnelle avec des gobelins. Il s’agit d’un petit moment d’inattention, mais ça nous fait passer à côté du côté un peu plus mystérieux que j’avais initialement prévu.
Commence alors la chasse aux Margotins. Je suis la suggestion du supplément de faire une action prolongée (test de Chasse) mais j’aurai du limiter à un seul jet de dé plus difficile (avec aide possible d’autres joueurs) car la soirée avançait. De manière générale je pense de plus en plus couper aux actions prolongées, car ce n’est pas forcément générateur de « vrai » suspense et cela a tendance à étirer un peu trop certaines scènes.
Les personnages trouvent enfin l’endroit où les margotins semblent s’être arrêtés pour se reposer: une caverne bloquée par une pierre, non loin d’une sombre forêt. Ils optent pour la confrontation directe : avec l’aide de leurs chevaux ils déplacent la pierre, mais le temps que leurs yeux s’habituent à l’obscurité, ils essuient plusieurs volées de flèches.
Le début du combat est dynamique et rythmé, avec un usage intéressant du terrain pour modifier les Seuils de Réussite (caverne étroite, luminosité différente, etc). A cinq personnages, la force de frappe est assez conséquente même pour de jeunes aventuriers. Les Margotins, que je prends un malin plaisir à jouer comme des créatures un peu stupides à la voix nasillarde, font quelques dégats et provoquent des tests de Protection, mais sont rapidement obligés de se retrancher vers le fond de la caverne.
Les joueurs utilisent assez efficacement leurs positions de Combat, et maîtrisent aussi les subtilités des coups précis, ce qui donne à chaque tour des choix (simples) à effectuer. On n’est pas dans le « je tape », ni dans le wargame tactique avec tonnes d’option, c’est vraiment un système qui nous convient bien.
Du fond de la caverne, le chef (un petit gobelin au regard vicieux), prend un couteau à dents et le pose sur le cou de l’enfant, et s’adresse aux aventuriers d’une voix haut perchée en leur disant qu’au moindre geste il la tue.
NB : Je voulais offrir une possibilité de sortir du combat autrement que par la violence, et cela aurait pu donner une situation intéressante, mais il commençait à se faire vraiment tard et ce n’était peut-être pas une si bonne idée que ça que de jouer un « mexican standoff ».
Du coup les « négociations » ont un peu trainé, dans la mesure où les joueurs ne voulaient pas laisser sortir le chef, mais n’avaient pas forcément d’idée sur quoi lui offrir en échange de la restitution de l’enfant (l’argent intéressant peu ces gobelins), donc ils n’arrivaient qu’à gagner du temps. Ma tentative de leur ouvrir une porte (révéler qu’il voulait commettre un sacrifice à une sorte d’entité de la forêt) n’a pas vraiment pris, alors qu’il y avait je pense quelque chose à exploiter. Il apparaissait en outre évident que je n’allais pas le laisser tuer l’enfant sous leurs yeux (on joue sans X Card, mais cela fait partie des limites que je m’impose automatiquement), ce qui rendait la menace du Gobelin de moins en moins crédible alors que la discussion progressait. J’ai donc ouvert une deuxième porte un peu plus visible, à savoir que dans le feu de l’action l’enfant avait commencé à libérer ses mains et regardait un des joueurs avec insistance.
Un jet d’Enigme un peu corsé et réussi a permis de faire comprend à l’enfant qu’elle devait faire diversion, et au moment où celle-ci décide de se laisser glisser entre ses vêtements, hors de l’étreinte du Gobelin, l’un des aventuriers (Edmund ? Celeblindi ? j’ai un doute) réussit un coup précis qui tue net le chef.
Nous ne jouons pas la fin du combat, les quelques gobelins restants ne faisant pas le poids face aux aventuriers.
NB : la séquence dans la grotte a pris globalement une heure de jeu, et s’est plutôt bien déroulée, mais avec un peu moins de fatigue de ma part et côté joueurs, ça aurait pu être une scène encore plus rythmée et mémorable. Là elle laisse un léger goût de « forcé ».
Nous terminons la séance alors que la compagnie approche du village avec la petite fille juchée sur un cheval.